La Nature est un temple où de vivants piliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles;
L’homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l’observent avec des regards familiers.
— Charles Baudelaire, Correspondances, 1857.
Un jour en sillonnant une forêt dans la banlieue est de Paris, j’ai aperçu une série d’arbres qui s’enchevêtrent sur une terre sombre et humide presque marécageuse. J’en ai été frappé. J’y retournai et descendis jusqu’au bord de ces arbres chaotiques, en longue contemplation, j’ai pris une photo d’eux. Cette nuit-là, j’ai rêvé de nouveau face à ces arbres enchevêtrés, mais j’ai découvert cette fois-ci qu’ils étaient en train de bouger leurs corps en lenteur et en pesanteur, murmurant l’un avec l’autre, c’était une réunion. J’entendais très vaguement leurs confuses paroles, il s’agissait sans doute des choses importantes. Cette perplexité m’a longtemps entouré. Après, de 2011 à 2014, j’allais rencontrer ces arbres dans les différentes moments du jour, notamment en nocturne. La nuit abrite la terre, elle nous prive aussi de la vue, la nature de ce moment ne peut plus être représentable. En revanche, à travers le geste minimal de la photographie, parfois avec le flash, au moment où la situation est révélée d’une manière surprenante, nous parviendrons à figer l’instant de correspondance avec la nature, avec ce qui a déjà pénétré au fond de nous, mais reste toujours invisible.
自然是活著的柱子撐起的神殿,
不時發出一些含糊不清的語言;
行人行經其中穿過象徵的森林,
森林注視行人露出親切的目光。
— 波德萊爾,《通感》,1857年